30.11.10

Jean-Luc Moulène " BBLR gauloises / Bière totale"



JLM, BBLR…

Jean-Luc Moulène, bercé par la génération « punk rock » et son nihilisme politique, est un artiste « propagateur » qui dit « non », enfin « oui » pour dire « non », considérant qu’il s’agit toujours de la bonne réponse pour un créateur : « C’est pour ne pas rester dans un « non » prononcé une seule fois que j’ai accepté de devenir officiellement un artiste. Bien entendu, aujourd’hui, je dis un oui qui n’est jamais qu’une double négation [...] espérant le moment où je vais pouvoir prononcer la troisième négation qui sera, elle, affirmative 1. » Jean-Luc Moulène donne à la contestation des ordres établis une réelle existence à travers la production d’icônes mêlant objets et photographies.
Conjointement à des collaborations graphiques et littéraires dans des fanzines, Jean-Luc Moulène travaille douze années en tant que conseiller artistique dans l’entreprise Thomson-Sintra Activités Sous-Marines. Artiste autoassumé, il s’adonne alors à un nouveau médium, la photographie, réalisant des clichés afin de rendre compte du visible, car « sans photographie, [il n’y a] pas de visibilité du prolétariat 2 ». Élargissant ensuite sa pratique, il expérimente autant le dessin, la sculpture, le collage, que la production d’objets manufacturés émanant d’actes de dérivation de « process » industriels.

Jean-Luc Moulène présente pour Valeurs croisées deux œuvres dans lesquelles il confronte le produit industriel à la possibilité de sa propre négation, laquelle mute en affirmation dans le devenir-artistique de celui-ci : BBLR Gauloises et Bière Totale.
BBLR Gauloises, titre significatif pour des objets qui le sont tout autant, est une pièce réalisée dans un « espace-temps » distendu. Elle se compose de trois paquets de cigarettes aux couleurs gauloises de la marque de même nom. Le rouge : le 11 juin 1982, les ouvriers de la manufacture de tabacs de la Seita à Pantin, qui occupaient les locaux depuis plusieurs mois pour protester contre la fermeture de l’établissement, décident de créer La Pantinoise, paquet de « Gauloises » rouge offert avec un bon de soutien vendu 5 francs. Le blanc – né de conflits sociaux dans les manufactures de tabacs de la Seita de Tonneins – appartient comme le rouge à la série des Objets de grève : « Objets (…) produits pendant des grèves, généralement à des fins manifestes, par réappropriation des outils de production des entreprises 3. » En exposant ces emblèmes de revendications sociales, porteurs d’une certaine parole publique, Jean-Luc Moulène leur confère une valeur d’icône. Le bleu – « monochrome » dénué d’inscription – pousse au bout l’intention de détournement : l’artiste en a retiré tout signe, tout discours, laissant seule la puissance signifiante et plastique de la couleur bleue Gauloise. Il mettra dix ans à parachever son idée, essayant, dans un premier temps et sans succès, de le faire fabriquer en infiltrant les systèmes de production de la Seita. Finalement, il sera produit, ironie du sort, tout à fait officiellement à l’issue d’une rencontre menant l’artiste à travailler directement avec le directeur de la manufacture, en 2000. Les valeurs politique et plastique de BBLR Gauloises nous interpellent : la perception que nous en avons, entre icône, symbole et sculpture, nous amène naturellement à nous interroger sur le statut de l’œuvre et de son auteur.
Bière Totale est une production spéciale basée sur le détournement d’une chaîne de fabrication de bière – au sein de la Brasserie Karlsberg à Homburg (Allemagne) en mai 2004. Les canettes sont épurées de tout signe publicitaire et une photographie grandeur nature fait état d’une palette de « packs » de bières éventrée. Le produit périmé a fait exploser son contenant entraînant une modification de l’intégrité de l’œuvre. Cet ensemble rend compte de la question de la pérennité de l’objet d’art : on se demande alors si « l’art, c’est l’idée de l’œuvre, l’idée qui existe sans matière 4 » ou bien si c’est l’entité physique de l’œuvre qui détermine son existence.

Photographe engagé, Jean-Luc Moulène jongle avec les mots et bouscule nos perceptions. Il aime les « objets non », ceux qui revendiquent, tout en considérant les œuvres d’art comme des « objets oui », de par leur nature révélatrice et détachée de toute aliénation.
Artiste de l’image du concept et du « concept fait image », Jean-Luc Moulène nous invite à reconsidérer nos habitudes intellectuelles et visuelles dans une visée critique et politique. Titres polysémiques ; iconographie des images ; valeurs intellectuelles et politiques ; engagements et critiques manifestes ; tout s’entremêle, se mêle, puis se démêle sans effort, et nous prenons conscience que « la seule démarche expérimentale valable se fonde sur la critique exacte des conditions existantes, et leur dépassement délibéré 5 ».


1. Conférence « Marc Partouche, Jean-Luc Moulène et Bruno Caron », Cycle de conférence de Valeurs croisées, première édition des Ateliers de Rennes – Biennale d’art contemporain, 14 juin 2008, les Champs libres, Rennes.
2. Dixit Jean-Luc Moulène, conférence « Marc Partouche, Jean-Luc Moulène et Bruno Caron », ibid.
3. Entretien de Jean-Luc Moulène et Patrick Cahuzac, Aubervilliers, le 13 août 1999.
4. Aristote, Les Parties des animaux, Les Belles Lettres, Paris, 2002.
5. Guy Debord, Rapport sur la construction des situations et sur les conditions de l’organisation et de l’action de la tendance situationniste internationale, 1957.



Nurtured by the Punk Rock generation and its political nihilism, Jean-Luc Moulène is a ‘disseminator’ artist who says “no”, well, “yes” when he means “no”, reckoning that this is still and invariably the right answer for a creative person: “I agreed to officially become an artist so that I wouldn’t be stuck in a ‘no’ uttered just once. Today, needless to say, I utter a ‘yes’ which is never anything but a double negative […] hoping for the moment when I’ll be able to utter the third negative which, for its part, will be affirmative”. 1 Jean-Luc Moulène gives a real existence to disputing established orders, through the production of icons blending objects and photographs.
Together with graphic and literary contributions in fanzines, Jean-Luc Moulène worked for twelve years as an art consultant in the Thomson-Sintra Activités Sous-Marines company. As a self-appointed artist, he then focused on a new medium, photography, producing photos and snapshots to describe the visible, for “without photography, [there is] no visibility for the proletariat” 2. By then broadening his praxis, he started to experiment with drawing, sculpture and collage, as well as the production of manufactured objects coming from acts deriving from industrial ‘processes’.

For Crossing Values, Jean-Luc Moulène is showing two Works in which he confronts the industrial product with the possibility of its own negation, which turns into affirmation in the artist-inthe-making process: BBLR Gauloises and Bière Totale [Total Beer].
BBLR Gauloises, a meaningful title for objects which are every bit as meaningful, is a piece made in a distended ‘spacetime’ frame. It consists of three packs of cigarettes with the ‘gauloise’ colours of the make of the same name. Red: on 11 June 1982, workers in the Seita 3 tobacco factory in Pantin, who had been occupying the premises for several months
to protest against the factory’s closure, decided to create La Pantinoise, a red pack of ‘Gauloises’ offered with a voucher of support for 5 francs. White—issuing from company disputes in the Seita tobacco works at Tonneins—belongs, like red, to the series of Objets de grève [Strike Objects]: “Objects […] produced during strikes, usually as a form of manifesto, by reappropriating companies’ production tools” 4. By exhibiting these emblems of social claims, steeped in a kind of public expression, Jean-Luc Moulène lends them an iconic value. Blue—a ‘monochrome’ devoid of any inscription—pushes the diversionary intent to the limit: the artist has removed all signs and all discourse, leaving just the significant and plastic power of the blue Gauloise colour. He would take ten years to bring his idea full circle, trying, in an initial phase and unsuccessfully,
to have it made by infiltrating the Seita production systems. In the end, it was produced, as fate would have it, quite officially after a meeting, which led to the artist working directly with the factory director, in 2000. The political and plastic values of BBLR Gauloises exercise us: the perception we have of them, somewhere between icon, symbol and sculpture, naturally prompts us to wonder about the status of the work and its author. Bière totale is a special production based on the appropriation of a beer production line in the Karlsberg Brewery at Homburg (Germany) in May 2004. The cans were rid of any advertising sign and a life-size photograph showed a ripped open pallet of beer packs. The product, past its sell-by date, caused its container to explode, leading to an alteration of the work’s integrity. This ensemble deals with the issue of the permanence of the art object: we thus wonder if “art is the idea of the art work, the idea which exists without matter” 5 or else if it is the physical entity of the art work which determines its existence.

As a politically committed photographer, Jean-Luc Moulène juggles with words and upsets our perceptions. He likes ‘no objects’, the ones which make a claim, while at the same time regarding artworks as ‘yes objects’, by virtue of their revelatory nature, aloof from all manner of alienation. As an artist dealing with the image of the concept and the ‘image-made concept’, Jean-Luc Moulène invites us to reconsider our intellectual and visual habits, aiming at something critical and political. Many-meaning’d titles, image-oriented iconography; intellectual and political values; commitments and manifesto-like criticism; everything is intermingled and mixed and is then effortlessly unmixed, and we become aware that “the sole valid experimental approach is based on the correct criticism of existing conditions, and going intentionally beyond them” 6.

1. Lecture ‘Marc Partouche, Jean-Luc Moulène et Bruno Caron’, Crossing Values
lectures cycle, 14 June 2008, les Champs libres, Rennes.
2. Dixit Jean-Luc Moulène, Lecture ‘Marc Partouche, Jean-Luc Moulène et
Bruno Caron’, ibid.
3. The French government tobacco and matches monopoly (Translator’s note)
4. Interview with Jean-Luc Moulène and Patrick Cahuzac, Aubervilliers, 13
August 1999.
5. Aristotle, Les Parties des animaux, Les Belles Lettres, Paris, 2002.
6. Guy Debord, Report on the Construction of Situations and on the International Situationist
Tendency’s Conditions of Organisation and Action, 1957.



Camille Planeix
Notice sur BBLR Gauloise et Bière Totale de Jean-Luc Moulène
Catalogue Valeurs croisées, 1ère édition des Ateliers de Rennes - 
Biennale d'art contemporain, 2009
Traduction : Simon Pleasance

BBLR Gauloises, mai 2003 / May 2003
Courtesy de l’artiste / of the artist et / and Galerie Chantal Crousel, Paris
Crédits photos : Mathieu Harel-Vivier


16.11.10

Nicolas Brasseur



Los Compatridos, still image on monitor. Courtesy de l'artiste


Diplômé des Arts Décoratifs de Paris en 2007, Nicolas Brasseur est un jeune plasticien explorant tant l’image que son sens. Il se tourne donc naturellement vers la photographie et la production d’objets/images. Son travail s’articule entre manipulation d’images et objectivisation iconographique autour du corps, des gestes, des attitudes dont l’artiste étudie les champs sémantiques, mais met aussi en exergue nos phénomènes types de représentation tant physique et psychique. 
Le corps est un de ses principaux questionnements. Au-delà du simple portrait, il photographie le corps en tant que réceptacle. Il en étudie différents états : le corps vieilli, la chaire morte, le corps meurtri, ou encore la division des corps. Dans un premier temps, l’impression acre et âpre que nous laisse la vision de ces corps marqués est sous-jacente, mais elle reste et croît et c’est là toute sa force. 
Avec le même regard, Nicolas Brasseur décrypte les gestes, mouvements corporels qui font sens (Los Compatridos ; Les Aloes) en les agençant dans un espace : celui de la photo et de son cadre. Ces mises en scènes portent à certains moments un regard critique sur notre société, comme dans Los Compadritos, où l’artiste tente de faire vaciller l’image que l’homme mâle s’est fabriqué. Los Compadritos esquisse une rixe à la manière d’une danse de paons tant sa composition semble chorégraphiée : «Deux hommes devant un mur de briques semblent nous danser un combat : Ils se sont exercés à se battre pendant si longtemps que le jeu du fer a recouvert l’origine du conflit : pas de couteau. Seuls comptent la portée du geste, l’élancement du corps, le code de la lutte. Peu importe qu’ils s’appellent Adam, Caen, Romulus ou Remus. Peu importe les vêtements qu’ils portent, la ville d’où ils sont venus. Seule compte la scène qu’ils nous rejouent, et que nous dévorons comme des enfants redemandent qu’on leur lise indéfiniment la même phrase d’un conte jusqu’à ce qu’il s’endorment.» (Extrait Diane Chavelet, à propos de l’exposition Inspiration / Ausatmen à Berlin en 2009). A d’autres instants, ces mises en scènes révèlent l’absurdité et la capacité évocatrice d’un geste sorti de son contexte (Les Aloes) et les multiples interprétations que l’on peut lui attribuer. 
Le travail de Nicolas Brasseur est certes éclectique, dans les questionnements qu’il soulève, mais reste fidèle à une image porteuse de sens. Celle-ci prend parfois le chemin de l’objet et bouscule imperceptiblement au premier abord, car ces images ou scènes qu’il photographie, met en scène ou produit nous sont ou semblent familières, presque banales. Cependant, les rencontres corporelles, les références littéraires et iconographiques qu’il sillonne nous amène dans un deuxième temps à regarder autrement de façon plus sensible, avec plus d’éthique. L’artiste manipule notre perception et nous force à l’objectivisation de celle-ci. 



Aloes, 30cm x 40cm, C-Print.
Courtesy de l'artiste 

Nicolas Brasseur is a young artist who graduated from the École des Arts Décoratifs de Paris in 2007. He investigates the Image and its sense through a photographic practice of making objects/images. His work is an articulation between the image manipulation and an iconographic objectivisation of the body, the gesture and the attitude. Those are studied as a semantic field but also as a hightlight of our typical phenomena of representation: physical and psychic. 
The body is one of his main questionings. Beyond the simple portrait, he photographs the body as receptacle. He studies various states of it: the old-looking body, the dead flesh, the bruised body and the division of bodies as well. At the first sight, these marked bodies leave an underlying bitter and acrid impression that stays and increases. This is where the strenght comes from. 
With the same look, Nicolas Brasseur deciphers gestures, physical movements, which make sense (Los Compatridos; Aloes) by ordering them in a space : the one of the photograph and its frame. Those mise-en-scene reveal sometimes a critical view of our society as in Los Compadritos, when the artist tries to upset the manly image they have build up. Los Compadritos sketchs a fight as a peacocks’ dance. In fact, its compsition seems to be choreographed: "Two men in motion before a wall of bricks seem to dance a fight. They practiced fighting for so long that the clash of iron to iron overpowered the origin of the conflict: no knife. All that matters is the impact of the movement, the slope of the body, the signs of combat. It doesn’t matter too much if they’re called Adam, Caen, Romulus or Remus. It doesn’t matter too much what clothes they wear or the city where they come from. All that counts is the scene that they carry out for us and our desire to consume this scene, reminiscent of a child who desires to hear a beloved sentence from a cherished tale until they fall asleep." (Dixit Diane Chavelet, about exhibition Inspiration/Ausatmen, in Berlin, 2009). At other moments, these staged photography reveal the nonsense and the suggestive capacity of a gesture taken out of his its context (Aloes) and the multiple interpretations we can attribute to them. 
The work of Nicolas Brasseur is eclectic, in the questionings he’s dealing with. Nevertherless his works leads to meaningfull pictures. Sometimes images switch into objects. At the first sight it knocks the viewer down imperceptibly, maybe because these images are or seem to be familiar to us, almost trivial. However, the physical meetings, the literary and iconographic references which he’s focusing on force a further look more sensitive, with more ethic. The artist manipulates our perception and imposes an objectivisation to us.

Camille Planeix  
Traduction : Nicolas Brasseur

14.11.10

Julien Prévieux "Lettres de non-motivation"


Lettres de non (Julien) motivation (Prévieux)

Artiste français de 34 ans, Julien Prévieux a une approche à la fois littéraire et cartésienne du capital humain immatériel. Méthodique, il a recours à des procédés rationnels afin de pénétrer des processus inhérents à notre civilisation. De cette manière, dans la série de dessins A la recherche du miracle économique (2006), il recompose les mots extraits de textes fondateurs de l’économie et décode d’autres intentions afin d’en tirer des perspectives nouvelles. Prolongeant ses recherches, il collecte avec What shall we do next (vidéo, 2007) les gestes liés aux nouvelles technologies et associés à des brevets déposés. Dans la même démarche de collection, Compostage est un relevé d’annotations anonymes trouvées dans des livres. Indices probants, les mots ainsi sortis de leur contexte prennent une autre dimension. En 2008, il met en scène sa propre exposition rétrospective : COMMENT, NO COMMENT (1).

Disséquant la relation entre l’individu et l’entreprise avec ses Lettres de non-motivation (2000-en cours), Julien Prévieux décrypte la production de valeurs au sein du capitalisme cognitif. Il manifeste dans ses lettres ce que chacun d’entre nous n’ose réaliser. Répondant à de réelles offres d’emploi, il rédige des lettres fictives, s’inventant à chaque occasion une identité, une profession, un langage ou des compétences afin de décliner les emplois proposés. Dans un style schizophrénique employant tour à tour humour, causticité, ironie ou sens de l’absurde, l’artiste rédige le contre-pied de lettres de motivation. Œuvre certes littéraire, les Lettres de non-motivation sont le reflet de l’ambivalence d’un mode de recrutement entre mise en avant et mépris de l’individu. Parmi les courriers types et les envois restés sans réponse, seul un pourcentage infime de ces mille lettres de non-motivation envoyées a reçu une réponse montrant que l’allusive candidature a retenu l’attention. La plus marquante, celle de la société Pilkington (2) qui refuse la qualification de « désuet » du métier de coupeur de verre, s’efforce de légitimer son intérêt et son utilité. Par ce procédé, Julien Prévieux intervertit le positionnement de « dominant » de l’employeur et celui de « dominé » du postulant. L’employeur en vient à motiver sa démarche d’entrepreneur et à argumenter ses actions et ses choix. L’entreprise Henkel (3), par exemple, justifie son slogan et son implication dans des œuvres caritatives face à l’accusation par l’artiste des déconvenues écologiques de la société dans le Kent en 2003.

S’adressant de sa position d’individu isolé à l’expérience collective, Julien Prévieux fait mouche avec des oeuvres aux confins du langage artistique et de l’anthropologie. Il agit comme un collectionneur étudiant son temps. A travers cette démarche, il dénonce le formatage de notre société, de ses codes de langage et son manque d’humanité.


1. Domaine de Kerguéhennec, Bignan (56), du 19 avril au 15 juin 2008.
2. «J’ai toutefois peu apprécié que vous puissiez tourner en dérision un des métiers les
plus reconnus de notre profession», Pilkington France.
3. «Pour vous expliquer brièvement notre démarche et qui nous sommes», Henkel France S.A.



Thirty-four-year-old French artist Julien Prévieux has an approach to the immaterial human capital that is at once literary and Cartesian. In his methodical way, he resorts to rational procedures in order to venture into processes inherent to our civilisation. In the series of drawings titled A la recherche du miracle économique [Looking for the Economic Miracle] (2006), he duly re-composes words taken from basic economic texts and decodes other intents, so as to derive new outlooks therefrom. By extending his research, with What shall we do next? (video, 2007), he collects gestures associated with new technologies and patents applied for. In the same collecting approach, Compostage is a survey of anonymous annotations found in books. Like so many searching clues, the words thus removed from their context take on another dimension. In 2008, he staged his own retrospective show: COMMENT, NO COMMENT (1).

In dissecting the relation between individual and business with his Lettres de non-motivation [Non-motivation letters] (2000-ongoing), Julien Prévieux deciphers the production of values within cognitive capitalism. In his letters, he displays what none of us dares to realise. Replying to real job offers, he writes fictitious letters, inventing himself each time with an identity, profession, language and qualifications, the better to deal with the jobs being proposed. In a schizophrenic style using, turn by turn, wit, sarcasm, irony and a sense of the absurd, the artist draws up the obverse of letters of intent. The Lettres de non-motivation are undoubtedly a literary opus, and as such they reflect the ambivalence of a recruitment method
somewhere between emphasising the individual and showing contempt for him. Among the standard letters and mail remaining unanswered, only a tiny percentage of these one thousand letters of intent dispatched received a response showing that his allusive candidacy had received some attention. The most striking one, from the Pilkington company (2), refusing the qualification “obsolete” for the trade of glass-cutter, strives to legitimise its interest and its usefulness. Through this procedure, Julien Prévieux reverses the ‘dominant’ position of the employer and the ‘dominated’ position of the applicant. The employer motivates his entrepreneurial approach and puts forward arguments for his actions and choices. The Henkel Company (3), for example, explains its slogan and its involvement in charitable works, when accused by the artist of ecological disappointments by the company in Kent in 2003. 

Addressing his position as an individual isolated from the collective experience, Julien Prévieux hits the bull’s eye with his works on the borderline of art language and anthropology. He acts like a collector studying his day and age. By way of this approach, he rails against the formatting of our society, its linguistic codes, and its lack of humanity.

1. Domaine de Kerguéhennec, Bignan (Brittany), from 19 April to 15 June 2008.
2. “But I did not greatly appreciate your mockery of one of the most acclaimed trades in
our profession”, Pilkington France.
3. “To give you a brief explanation of our approach and who we are”, Henkel France S.A.


Camille Planeix
Notice sur les Lettres de non-motivations de Julien Prévieux 
Catalogue Valeurs croisées, 1ère édition des Ateliers de Rennes - 
Biennale d'art contemporain, 2009
Traduction : Simon Pleasance




Lettres de non-motivation, Projet en cours depuis 2000
Petites annonce, lettres et réponses
Courtesy de l’artiste et de la Galerie Jousse
Entreprise, Paris